Alzheimer : et si notre microbiote intestinal pouvait protéger notre cerveau ?

Dessin au fusain représentant l’interaction entre le microbiote intestinal et les cellules cérébrales, illustrant la régulation de l’inflammation par le propionate

En bref

Une étude publiée dansThe journal of clinical investigation révèle que certains microbes intestinaux pourraient ralentir la progression de la maladie d’Alzheimer en régulant l’inflammation cérébrale grâce à un acide gras appelé propionate. Ce mécanisme agit sur les astrocytes réactifs, des cellules clés dans les processus neurodégénératifs.

Introduction

La maladie d’Alzheimer est une pathologie neurodégénérative complexe, dont les causes sont multiples et encore mal comprises. Parmi les pistes explorées ces dernières années, le rôle du microbiote intestinal suscite un intérêt croissant.

Une nouvelle étude publiée dans The journal of clinical investigation en 2025 apporte un éclairage inédit : elle montre que certaines bactéries intestinales peuvent moduler l’activité inflammatoire du cerveau, via la production d’une molécule appelée propionate. Cette découverte met en évidence un lien fonctionnel entre l’écosystème intestinal et l’inflammation cérébrale associée à l’amyloïdose Aβ, caractéristique de la maladie d’Alzheimer.

L’étude

Le contexte

La maladie d’Alzheimer se caractérise notamment par l’accumulation de plaques d’amyloïde-β (Aβ) dans le cerveau. Ce processus active une réponse inflammatoire chronique, notamment via des cellules appelées astrocytes réactifs.

Ces astrocytes, lorsqu’ils sont trop activés, entretiennent la neuroinflammation et accélèrent la dégradation neuronale.

L’objet de l’étude

Les chercheurs ont voulu comprendre si — et comment — le microbiote intestinal influence cette activation délétère des astrocytes pendant l’amyloïdose Aβ.

La méthode

  • Modèles murins porteurs d’amyloïdose (mimant la maladie d’Alzheimer).
  • Comparaison entre souris avec microbiote normal et souris axéniques (sans microbiote).
  • Analyse du comportement des astrocytes et de la régulation immunitaire dans le cerveau.

Résultats clés

  1. Les souris sans microbiote présentaient beaucoup moins d’astrocytes réactifs, malgré des niveaux identiques de dépôts d’amyloïde-β.➜ Cela suggère que le microbiote amplifie la neuroinflammation, indépendamment du degré d’amyloïdose.
  2. Les chercheurs ont identifié une molécule-clé produite par certaines bactéries : le propionate, un acide gras à chaîne courte (SCFA).
  3. Le propionate agit en activant la voie immunitaire IL-17, qui régule l’expression de gènes pro-inflammatoires chez les astrocytes.
  4. En bloquant IL-17, les chercheurs ont réussi à réduire considérablement l’activation astrocytaire, ouvrant la voie à de nouvelles pistes thérapeutiques.

Ce que nous pouvons faire pour notre santé selon cette étude

Cette recherche suggère que notre alimentation et notre microbiote peuvent moduler l’inflammation cérébrale, un facteur central dans la progression d’Alzheimer. Voici quelques pistes concrètes :

Soutenir un microbiote diversifié et protecteur

Favoriser les bactéries productrices de propionate pourrait contribuer à limiter l’activation neuro-inflammatoire. Cela implique :

  • Une alimentation riche en fibres prébiotiques (légumes, fruits, légumineuses, céréales complètes).
  • Une consommation régulière de légumes fermentés (comme la choucroute crue ou le kimchi).
  • Une limitation des sucres raffinés et additifs altérant le microbiote.

Surveiller la santé intestinale au quotidien

Le lien entre intestin et cerveau s’appelle l’axe intestin-cerveau. Il implique le nerf vague, les métabolites bactériens, le système immunitaire…

Prendre soin de son intestin, c’est aussi :

  • Éviter les antibiothérapies à répétition,
  • Gérer le stress chronique (qui altère le microbiote),
  • Dormir suffisamment pour réguler l’inflammation.

Cette étude ouvre la voie à des traitements préventifs ou curatifs agissant via :

  • Des probiotiques ciblés,
  • Des compléments en SCFA comme le propionate,
  • Ou des inhibiteurs de la voie IL-17.

Conclusion

Les résultats de cette étude soulignent l’importance des interactions entre le microbiote intestinal et le cerveau dans le contexte des maladies neurodégénératives.

Ils ouvrent la voie à de nouvelles stratégies de prévention ou de modulation de l’inflammation cérébrale, par des approches nutritionnelles ou thérapeutiques ciblant le microbiote et ses métabolites.

Bien que ces résultats soient issus de modèles animaux, ils renforcent l’idée que la santé cérébrale passe aussi par l’équilibre de notre microbiote intestinal.

Source

Chandra S, Popovic J, Singhal NK, Watkins EA, Dodiya HB, Weigle IQ, Salvo MA, Ramakrishnan A, Chen Z, Watson JT, Shetti A, Piehl N, Zhang X, Cuddy LK, Sadleir KR, Schwulst SJ, Prakriya M, Gate D, Sisodia SS, Vassar R. The gut microbiome controls reactive astrocytosis during Aβ amyloidosis via propionate-mediated regulation of IL-17. J Clin Invest. 2025 May 13:e180826. doi: 10.1172/JCI180826. https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/40359034/

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